Kenya : la Cour suprême ravive les tensions en relançant le controversé projet de loi de finances 2023
La Cour suprême du Kenya vient de raviver les tensions en réhabilitant le projet de loi de finances 2023, une décision qui relance le débat houleux autour de la fiscalité et du coût de la vie dans le pays. Ce texte, soutenu par le gouvernement de William Ruto, avait provoqué une vive contestation populaire, principalement en raison des hausses d'impôts et de la réduction des subventions, mesures qui touchent de plein fouet les ménages modestes et la classe moyenne kényane.
La Cour suprême, arbitre d’un bras de fer économique et social
La validation du projet par la Cour suprême renforce le pouvoir exécutif, permettant au président Ruto de mettre en place une réforme économique controversée qui vise, selon lui, à « stabiliser » les finances publiques et attirer des investissements étrangers. Cependant, pour de nombreux Kényans, cette décision symbolise une rupture avec les engagements de campagne de Ruto, qui avait promis une économie plus favorable aux citoyens en difficulté. Le projet de loi inclut notamment une augmentation de la TVA sur les carburants et des taxes additionnelles sur les télécommunications et l'immobilier, des secteurs vitaux pour une grande partie de la population.
Cette décision de justice intervient après plusieurs mois de débats acharnés. Les opposants au texte ont maintes fois exprimé leur inquiétude face à l’aggravation des conditions de vie, estimant que le projet de loi exacerbera la pauvreté en rendant de nombreux produits et services inaccessibles pour les plus vulnérables. Les syndicats, les organisations de la société civile et une partie de l’opposition politique avaient d’ailleurs massivement dénoncé ce texte, qualifiant la hausse des taxes d’injuste et de déconnectée des réalités des ménages kényans.
Un projet de loi symbole des contradictions de l'administration Ruto
La posture du président Ruto vis-à-vis de cette réforme fiscale ne fait qu’accentuer les critiques, car il avait initialement promis une politique économique favorable aux travailleurs et aux petites entreprises. Or, ce projet de loi, qui alourdit les taxes tout en réduisant les subventions, semble davantage aligné sur des impératifs financiers internationaux que sur les attentes locales. Les soutiens de Ruto affirment néanmoins que ces mesures sont nécessaires pour juguler la dette nationale croissante et renforcer l'autonomie financière du pays.
Les économistes du gouvernement soulignent que l’augmentation de la TVA et des taxes sur certains secteurs économiques stratégiques est censée injecter de nouveaux revenus dans les caisses publiques, aujourd’hui affaiblies par une dette extérieure importante. Mais les détracteurs de cette stratégie rappellent que ces taxes risquent d’étrangler encore plus les petits entrepreneurs et les consommateurs ordinaires. Des sondages récents montrent que l’opinion publique reste majoritairement opposée à cette loi, estimant qu’elle va à l’encontre des promesses électorales et aggrave une situation économique déjà fragile, marquée par des prix alimentaires en hausse et un chômage préoccupant.
Vers une nouvelle vague de protestations ?
La décision de la Cour suprême pourrait relancer une nouvelle série de manifestations et de mobilisations à travers le Kenya. Au cours de l’année écoulée, plusieurs protestations massives avaient déjà secoué Nairobi et d'autres grandes villes du pays, où les citoyens dénonçaient la flambée des prix et la baisse du pouvoir d'achat. Ces rassemblements pourraient prendre de l'ampleur dans les jours à venir, car l’opposition menée par Raila Odinga et les syndicats ont déjà appelé à des actions de protestation contre la reprise de ce projet de loi.
Le spectre de la désobéissance civile pèse sur le climat social kényan, d’autant que de nombreux leaders communautaires et organisations de la société civile voient dans la validation de ce projet de loi une trahison des promesses de justice sociale et d’équité économique. Ils craignent que la réforme n’introduise des disparités économiques encore plus criantes entre les classes sociales, à un moment où le pays peine à se remettre des impacts de la pandémie de COVID-19 et de la crise climatique qui affecte ses récoltes.
En somme, la Cour suprême du Kenya a, par cette décision, relancé le débat national autour du modèle économique et fiscal du pays. Alors que le gouvernement semble déterminé à avancer avec cette réforme controversée, la société civile et une grande partie des citoyens restent résolus à exprimer leur désaccord face à ce qu’ils perçoivent comme un fardeau fiscal insupportable. Le Kenya s’engage ainsi dans une période où la cohésion sociale pourrait être mise à l’épreuve, alors que chaque camp campe fermement sur ses positions, entre nécessité budgétaire et justice sociale.
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