
Ruashi Mining, filiale de Jinchuan, condamnée en RDC : 18 mois de prison pour son DG Wang Tao et 10 millions de dollars d’amende
Un jugement qui fissure l’armure des géants miniers
Le 21 février 2025, le Tribunal de paix de Kinshasa/Gombe a rendu un verdict qui résonne comme un coup de tonnerre dans le ciel souvent opaque des affaires minières en Afrique. Wang Tao, directeur général de Ruashi Mining SAS, a été condamné à 18 mois de prison ferme et à une amende de 2 millions de francs congolais pour bris de scellés et dénonciation calomnieuse. La société Ruashi Mining, filiale à 75 % de Metorex — elle-même propriété du géant chinois Jinchuan — et à 25 % de la Gécamines, a été solidairement condamnée à verser 10 millions de dollars de dommages et intérêts à l'entrepreneur franco-congolais Pascal Beveraggi.
Ce jugement est d'autant plus retentissant qu'il s'attaque à une entreprise sous contrôle chinois, opérant dans un secteur stratégique pour la RDC : l'exploitation du cuivre et du cobalt, métaux essentiels à la transition énergétique mondiale. La mine de Ruashi, située près de Lubumbashi, est l'une des plus importantes du pays et symbolise l'emprise croissante de la Chine sur les ressources africaines.
Une affaire aux ramifications tentaculaires
À l'origine du litige, une dette de 7,5 millions de dollars que Ruashi Mining devait aux sociétés NB Mining Africa SA et Octavia Limited, dirigées par Pascal Beveraggi. Malgré plusieurs décisions judiciaires en faveur de l'entrepreneur, Wang Tao aurait tenté de bloquer l'exécution des saisies en introduisant de nouvelles requêtes contradictoires et en détournant des sommes saisies, notamment 1 million de dollars auprès de la TMB et près de 460 000 dollars chez Ecobank.
Il est également accusé d'avoir fait apposer de nouveaux scellés sur des biens déjà saisis et d'avoir transmis des documents falsifiés aux autorités judiciaires. Des pratiques qui, si elles étaient avérées, témoigneraient d'une volonté délibérée de contourner l'autorité judiciaire congolaise.
La condamnation de Wang Tao et de Ruashi Mining marque une rare victoire judiciaire contre une entreprise étrangère puissante en RDC. Elle pourrait ouvrir la voie à une remise en question plus large de la gouvernance des filiales minières étrangères opérant en Afrique centrale.
L'Afrique face à ses démons et à ses ressources
Cette affaire met en lumière les tensions croissantes entre les États africains et les multinationales étrangères exploitant leurs ressources naturelles. En RDC, comme ailleurs sur le continent, les populations locales voient souvent peu de retombées positives des activités minières, tandis que les profits s'envolent vers des horizons lointains.
La condamnation de Ruashi Mining pourrait être interprétée comme un signal fort envoyé par la justice congolaise : l'époque de l'impunité pour les géants miniers étrangers est peut-être révolue. Elle rappelle également la nécessité pour les pays africains de renforcer leurs institutions judiciaires et de veiller à ce que l'exploitation de leurs ressources bénéficie en premier lieu à leurs citoyens.
Dans un contexte où la demande mondiale en métaux stratégiques ne cesse de croître, l'Afrique doit plus que jamais affirmer sa souveraineté et s'assurer que ses richesses naturelles servent son développement et non celui d'intérêts étrangers.
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