
Après l’explosion mortelle en Centrafrique, la chute d’Enerca secoue Touadéra
Le 25 juin, un transformateur d’Energie Centrafricaine (Enerca) explose dans l’enceinte du lycée Barthélémy Boganda, en pleine épreuve du baccalauréat. Bilan provisoire : au moins 29 lycéens tués, 260 blessés. Au lendemain, la police interpelle les dirigeants d’Enerca, dont le directeur général, dans un climat de défiance croissante envers le régime Touadéra, pris entre le deuil national et des pressions politiques accrues.
Un lycée endeuillé, un État mis en cause
Mercredi 25 juin vers 13h à Bangui, le lycée Boganda, principal centre d’examen du baccalauréat, est frappé par l’explosion d’un transformateur. Sous tension après une intervention de maintenance, l’appareil lâche dans le hall principal, déclenchant une panique meurtrière.
Résultat : 29 élèves sont tués, 260 blessés . La Centrafrique plonge dans le deuil, prolongé sur trois jours par la présidence.
Le ministère de la Santé précise que c’est le rétablissement du courant par Enerca, en pleine épreuve, qui a précipité le drame. Des témoins évoquent une gestion chaotique et des pansements sur une fuite électrique inadaptés à la présence de plus de 5 000 candidats.
Enerca sous les verrous, la justice fait son œuvre
Jeudi, trois hauts responsables d’Enerca – le directeur général Thierry-Patient Bendima, le directeur technique et le chef d’exploitation – sont convoqués puis placés en garde à vue par l’Office central de répression du banditisme (OCRB). Ils sont mis en cause pour « négligence professionnelle » dans la conduite et l’exécution des opérations de maintenance.
Coupables ? Âu-delà des individus, les failles exposées sont systémiques : Enerca – entreprise publique fondée en 1963 – peine depuis des années à maintenir son parc de production (centrales hydrauliques et thermiques) en bon état. Circuit déficient, entretien minimal, collecte tarifaire chaotique : l’infrastructure électrique du pays est un gruyère à ciel ouvert, et les utilisateurs sont à bout .
Touadéra entre urgence et élection
Le président Faustin-Archange Touadéra, en déplacement à Bruxelles pour un sommet de l’Alliance du vaccin au moment du drame, se trouve confronté à un dilemme : trancher dans la gestion d’Enerca pour apaiser l’opinion, tout en évitant de fragiliser son propre appareil politique à quelques mois de l’élection présidentielle.
Le pouvoir affiche sa fermeté, suspension immédiate des cadres supérieurs, enquête judiciaire ouverte, sécurisation des sites publics d’examen, mais derrière les décisions, la défiance gronde. Des lycéens en marche commémorative sont empêchés, des leaders de la société civile interpellés . Une main de fer qui trahit l’angoisse d’un président inquiet de perdre le contrôle dans un pays où les services publics sont déjà considérés comme des passoires.
Ce drame électrique aura-t-il le pouvoir de déclencher la résilience nationale dont la Centrafrique a besoin, ou finira-t-il en simple étincelle politique ? Entre défi technique, élection à l’horizon et défiance de la population, Touadéra semble jouer sa crédibilité sur un fil. S’il échoue à réformer Enerca en profondeur, ce sont toutes les fondations mêmes de l’État centrafricain qui seront ébranlées.
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