
Les Émirats misent sur l’IA comme d'autres misaient sur l'or noir
Pendant que les Émirats bâtissent des empires d’IA dans le désert, l’Afrique regarde encore ses ingénieurs fuir faute de vision stratégique.
Le 20e siècle appartenait au pétrole. Le 21e, sans appel, est celui de la donnée, de la machine, de l’algorithme. Et dans ce monde en mutation, certains ont décidé de ne pas attendre les injonctions occidentales pour s’imposer. Abu Dhabi ne rêve plus de gratte-ciels, il façonne des cerveaux numériques. Dubaï ne construit plus seulement des malls géants, elle programme l’intelligence de demain. À l’heure où l’Afrique s’interroge encore sur l’industrialisation, les Émirats, eux, codent leur avenir.
Abu Dhabi, futur cerveau du monde
À eux seuls, les Émirats Arabes Unis injecteront 1 400 milliards de dollars dans l’économie américaine sur dix ans. Une bonne partie ira dans les infrastructures IA et les semi-conducteurs. Pas pour faire joli, mais pour s’imposer comme le cœur mondial de la machine intelligente.
À la manœuvre : Sheikh Tahnoon bin Zayed, surnommé par certains diplomates occidentaux “le cerveau du Golfe”. Il dirige ADIA (790 milliards de dollars d’actifs) tout en pilotant la stratégie IA du pays. Une concentration de pouvoir, de cash et de clairvoyance qu’aucun ministre africain de l’économie ne pourrait rêver, tant nos modèles restent fragmentés, mous, ou trop dépendants.
Multiply Group, autre bras armé émirati, vise à gérer 100 milliards de dollars en tech, tandis qu’ADQ balance 25 milliards dans les data centers américains. Et ce n’est pas fini : Palantir, Aleria (leur IA souveraine), campus européen d’IA en France... Les Émirats s’installent partout, tout le temps, avec une froide efficacité.
Riyad, Doha, et les autres : en roue libre
Face à la fusée émiratie, l’Arabie Saoudite tente de suivre… en courant. Malgré des annonces tonitruantes (40 puis 150 milliards de dollars pour la tech, 600 milliards aux États-Unis), Riyad semble courir après un train déjà lancé. Le problème ? Une vision dispersée, des investissements éclatés, sans axe clair sur l’IA.
Le Qatar, lui, préfère acheter du foot et investir dans les niches. Tant mieux pour Mbappé, moins pour les ingénieurs du Golfe. Résultat : malgré un chèque de 10 milliards d’euros pour la tech française, Doha joue encore en seconde division.
Quant aux autres monarchies du Golfe : Koweït, Bahreïn, Oman, elles font tapisserie. Pas de stratégie IA, pas de fonds dédiés, rien. Elles vivent sur leurs rentes pétrolières, comme certains États africains sur leurs dettes et aides extérieures.
Et l’Afrique dans tout ça ? Invisible sur la carte IA
On ne va pas se mentir : pendant que les Émirats codent leur destin, l’Afrique regarde ailleurs. Oui, il existe des hubs tech à Lagos, Nairobi, Le Cap ou Kigali. Oui, des talents émergent. Mais où sont les méga-investissements ? Où sont les stratégies souveraines ? Où est l’équivalent d’un Sheikh Tahnoon, visionnaire, stratège et doté des leviers pour exécuter ?
On envoie nos ingénieurs chez Google, nos data scientists à Montréal, nos développeurs à Berlin. Le continent forme mais ne garde pas. Il parle de souveraineté mais ne programme rien.
Alors que les Émirats investissent dans l’IA pour en devenir maîtres, l’Afrique, elle, mendie des subventions pour acheter du matériel chinois. Si ça ne change pas rapidement, l’écart technologique entre Abu Dhabi et Dakar sera aussi large que celui entre Silicon Valley et Ouagadougou.
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