Ce matin, une page de l’histoire politique gabonaise s’est tournée avec fracas. Pierre-Claver Maganga Moussavou, Albert Ondo Ossa, Alain-Claude Bilie-By-Nzé et Ali Akbar Onanga Y’Obégué se sont unis pour dénoncer ce qu’ils considèrent comme une dérive autoritaire du régime de transition dirigé par Brice Oligui Nguema.
Si leurs parcours politiques les avaient parfois opposés, leur constat est aujourd’hui commun : le CTRI a confisqué la transition et verrouille le pays au mépris des promesses initiales. Cette alliance, impensable il y a encore quelques mois, est le fruit d’une mobilisation populaire grandissante, nourrie par des collectifs comme Gabon 2025, qui ont alerté sur les manœuvres du pouvoir.
Un régime militaire de plus en plus contesté
Depuis son coup d’État du 30 août 2023, Brice Oligui Nguema avait promis une transition démocratique et inclusive. Un an plus tard, les actes du CTRI sont à mille lieues de ces engagements.
Les quatre leaders, désormais rassemblés sous une même bannière, dénoncent une militarisation du pouvoir et une opacité grandissante dans la gestion du pays. Selon eux, le gouvernement de transition modifie la Constitution à sa guise, prend des décisions unilatérales et élimine progressivement toute voix dissidente.
Le référendum récent, censé entériner un retour aux institutions démocratiques, est qualifié de mascarade par cette coalition. Le texte constitutionnel a été remanié dans la foulée, sans consultation, jetant un doute sérieux sur la sincérité du processus.
Quatre figures, une même colère
Rarement dans l’histoire récente du Gabon des personnalités aussi différentes se sont retrouvées unies dans une même lutte :
- Pierre-Claver Maganga Moussavou, ex-vice-président et vétéran de la politique, connu pour son approche modérée.
- Albert Ondo Ossa, professeur d’économie et ancien ministre, qui a incarné l’opposition à la présidentielle de 2023.
- Alain-Claude Bilie-By-Nzé, ex-Premier ministre sous Ali Bongo, qui a été une figure du pouvoir avant de prendre ses distances avec le régime militaire.
- Ali Akbar Onanga Y’Obégué, ancien directeur général des impôts et fin technocrate, dont le ralliement montre l’ampleur du malaise dans l’administration gabonaise.
Leur alliance n’est pas une fusion politique, mais une convergence de colère et d’urgence face à ce qu’ils considèrent comme un détournement du processus de transition.
Un peuple qui gronde, une légitimité qui s’effrite
Si cette déclaration commune fait autant de bruit, c’est parce qu’elle intervient dans un contexte explosif. Le régime d’Oligui est déjà sous pression :
- Le scandale du concours truqué de l’ENA a révélé une administration gangrenée par des passe-droits et des irrégularités.
- La gestion de la SEEG, symbole du déclin des services publics, est une source de mécontentement croissant.
- Les fonctionnaires attendent toujours leur salaire, tandis que des milliards sont injectés dans des projets opaques.
- Les résultats du référendum ont été contestés, et la modification de la Constitution post-vote a mis en lumière les manipulations du pouvoir.
Loin d’un simple appel symbolique, cette union se veut une réponse à la frustration d’une population qui ne voit aucun changement concret depuis le putsch. Les réseaux sociaux s’embrasent, les discussions se multiplient : Oligui Nguema n’a plus le monopole de la parole politique.
Une riposte du régime à venir ?
Jusqu’ici, la stratégie du pouvoir a été de minimiser les critiques, de contrôler les médias et de discréditer l’opposition. Mais cette fois-ci, la contestation vient de tous les fronts : des vétérans de la politique, des technocrates, des figures issues de l’ancien régime et même des partisans de la transition déçus par l’évolution des événements.
La grande question est désormais la suivante : Oligui choisira-t-il l’apaisement ou la répression ?
Face à un pouvoir qui vacille, la mobilisation populaire pourrait être la clé du dénouement. Ce n’est peut-être que le début de la fin pour le CTRI.
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