RDC : Moïse Katumbi et la piste d'atterrissage de Mulonde, les prémices d'une déstabilisation ?
Les 1er et 2 octobre 2024, une descente musclée a eu lieu sur une propriété de Moïse Katumbi, figure controversée, opposant au président Congolais. Située à Mulonde, près de Pweto dans le Haut-Katanga, cette propriété fait l’objet d’une enquête militaire suite à la réhabilitation d'une piste d’atterrissage sur place. L’affaire, révélée par le directeur de cabinet de Katumbi, Olivier Kamitatu, sur X (anciennement Twitter), a immédiatement enflammé les débats, aussi bien dans le camp de Félix Tshisekedi que dans celui de l'opposant.
Des soupçons de déstabilisation ou un simple projet humanitaire ?
Selon les autorités congolaises, la réhabilitation de cette piste d’atterrissage pourrait poser une menace pour la sécurité nationale. Plusieurs sources militaires ont exprimé leurs craintes de voir cette piste utilisée comme base de ravitaillement pour des forces insurgées, dans une région où des groupes armés, comme le M23, cherchent à étendre leurs activités.
La zone du grand Katanga, toujours sensible, est perçue comme une véritable poudrière, et la réhabilitation discrète de cette piste n’a fait qu’amplifier les soupçons.Pour justifier leur intervention, les autorités pointent du doigt le défaut d’autorisation préalable pour ces travaux. Ils affirment que les initiatives de Katumbi à Mulonde ont été lancées sans consulter les autorités civiles et militaires compétentes, ce qui a renforcé leur méfiance. Une délégation de l'armée et des services de renseignement a ainsi été dépêchée pour tirer cette affaire au clair.
La défense de Katumbi : Activités humanitaires et désenclavement
De son côté, Moïse Katumbi réfute catégoriquement toute intention belliqueuse. Il a rendu publique une lettre datée du 24 septembre 2024, adressée à l’autorité de l’aviation civile, dans laquelle il explique que les travaux visent uniquement à désenclaver la région et à faciliter l’évacuation des malades. La zone de Mulonde, à 500 km de Lubumbashi et à 100 km de la frontière zambienne, est en effet extrêmement isolée, sans infrastructures adéquates.
Katumbi souligne que ce n’est pas la première fois qu’il engage des travaux de ce type, rappelant qu’il a déjà mené des initiatives similaires à Pweto, Kashobwe et Kiubo, sans que cela n’ait provoqué de réaction de la part des autorités. Il s’interroge donc sur la véritable motivation derrière cette soudaine inquiétude gouvernementale..
Un contexte politique tendu
Au-delà des accusations formelles, de nombreux observateurs voient dans cette affaire une manœuvre politique orchestrée par le pouvoir en place pour affaiblir un rival potentiellement dangereux à l’approche des prochaines échéances électorales. Moïse Katumbi, figure de l’opposition et ancien gouverneur du Katanga, est perçu comme l'un des principaux adversaires de Félix Tshisekedi en vue des élections présidentielles à venir. Son parti, Ensemble pour la République, a rapidement dénoncé cette descente militaire comme une tentative d’intimidation visant à bloquer les activités de leur leader.
Les tensions entre le camp Tshisekedi et Katumbi ne sont pas nouvelles. Depuis le départ de Katumbi de la coalition gouvernementale, les relations se sont envenimées, chaque camp multipliant les coups bas et les accusations. Dans ce climat tendu, l’affaire de la piste de Mulonde n’est que le dernier épisode en date d’une confrontation politique qui s'intensifie à l'approche des scrutins.
Quelles suites pour l’enquête ?
Les autorités ont promis de faire la lumière sur cette affaire. L’enquête, menée conjointement par l'armée et les services de renseignement, doit déterminer si cette piste constitue réellement une menace pour la sécurité nationale ou s’il s’agit, comme l’affirme Katumbi, d’un projet purement caritatif. En attendant, cette affaire alimente les soupçons dans un climat déjà délétère où les questions de sécurité se mêlent aux stratégies politiques.
Le mystère qui entoure la piste d’atterrissage de Mulonde dépasse la simple question logistique. Elle révèle l’intensité des tensions politiques en RDC, où chaque geste est scruté à la loupe dans une ambiance de suspicion permanente. Pour Katumbi, ces travaux s’inscrivent dans une démarche humanitaire visant à désenclaver une région reculée. Pour les autorités, la piste pourrait devenir un outil de déstabilisation. Une chose est sûre : à l’approche des élections, la moindre initiative de l’opposition sera interprétée comme une tentative de prise de pouvoir.
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