Sommet de la Francophonie : l'incident diplomatique Fatshi-Kagame qui a refroidi l'ambiance
Francophonie : la diplomatie en panne face aux conflits régionaux
Le Sommet de la Francophonie, censé être un moment de dialogue et de coopération entre les pays francophones, a été marqué par un incident qui a mis en lumière les divisions géopolitiques profondes entre certains États membres. À l’épicentre de cette polémique, les présidents de la République Démocratique du Congo (RDC), Félix Tshisekedi, et du Rwanda, Paul Kagame, dont les relations diplomatiques sont déjà au plus bas en raison des conflits dans l'Est congolais.
Le sommet, qui s’est tenu dans une ambiance tendue, a pris une tournure inattendue lorsque Félix Tshisekedi a quitté les discussions après le discours d'Emmanuel Macron, président français. Ce dernier, pourtant médiateur traditionnel des crises africaines, a évité de traiter en profondeur la question des violences dans le Nord-Kivu, où le groupe rebelle M23, soutenu par Kigali selon Kinshasa, continue de semer la terreur.
Pour la RDC, cette omission était plus qu’un simple oubli diplomatique. "Il est impensable que nous assistions à un sommet censé promouvoir la paix et la coopération, sans que les souffrances de millions de Congolais ne soient évoquées", a déclaré une source proche de la délégation congolaise. Le départ précipité de Tshisekedi a jeté un froid dans l’assemblée, laissant entrevoir des différends bien plus profonds que ceux exprimés publiquement.
M23 : un fantôme qui hante les relations Rwanda-RDC
Le groupe rebelle M23, accusé d’être soutenu par le Rwanda, est l’un des points de crispation majeurs dans les relations entre Kinshasa et Kigali. Depuis des années, la RDC accuse Paul Kagame de fournir une aide militaire et logistique à ces rebelles qui déstabilisent l’Est congolais. De son côté, Kigali nie ces allégations tout en accusant la RDC de collaborer avec les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), un groupe armé impliqué dans le génocide de 1994.
Le sommet de la Francophonie aurait pu servir de plateforme pour aborder ces questions. Cependant, l’absence de volonté politique, combinée à des jeux d’alliances complexes, a empêché toute véritable discussion sur le sujet. La secrétaire générale de l'Organisation internationale de la Francophonie (OIF), Louise Mushikiwabo, ancienne ministre des Affaires étrangères du Rwanda, n’a pas apaisé les craintes de la délégation congolaise, qui y voit une mainmise rwandaise sur les décisions de l’OIF.
Pour plusieurs observateurs, le silence de Macron et l’attitude de Kagame relèvent d’un véritable malaise diplomatique. "Il est clair que la France, en tant qu’ancienne puissance coloniale et alliée des deux nations, préfère éviter de prendre parti ouvertement", souligne un diplomate présent au sommet. "Mais à force de jouer l’équilibriste, Paris risque de perdre son influence en Afrique."
La Francophonie éclipsée par la politique des puissances régionales
En dépit des enjeux culturels et linguistiques au cœur de la Francophonie, ce sommet a montré que la politique prenait souvent le dessus sur les idéaux de coopération. L’organisation, initialement conçue pour renforcer les liens entre les pays partageant une langue commune, se retrouve aujourd’hui paralysée par des tensions qui dépassent largement son cadre.
Pour beaucoup, cet incident est symptomatique d’un problème plus large au sein de l’OIF. "Les questions politiques et économiques finissent toujours par éclipser les projets de coopération culturelle et linguistique", affirme un analyste. "Le sommet est censé rapprocher les nations, mais il est évident que certains pays, comme la RDC et le Rwanda, utilisent cette tribune pour marquer leurs différends."
Le sommet a pourtant tenté de faire bonne figure en promouvant des thèmes plus consensuels comme l’éducation, la jeunesse ou encore la lutte contre le changement climatique. Mais l’ombre des conflits armés dans le Nord-Kivu, ainsi que les rivalités entre les puissances régionales, ont dominé les discussions en coulisses.
Les critiques ne se sont pas faites attendre. Plusieurs ONG présentes à l'événement ont dénoncé l’incapacité des dirigeants à aborder franchement les crises qui secouent le continent africain. "C’est un sommet qui parle de tout, sauf de l’essentiel", a déploré l’une d’elles, regrettant l’absence de véritables avancées sur des sujets comme les droits humains ou la sécurité.
Vers une réforme nécessaire ?
Cet incident diplomatique soulève une question fondamentale : la Francophonie peut-elle encore jouer un rôle dans la gestion des crises politiques et sécuritaires en Afrique ? Si l’OIF se veut un espace de dialogue, force est de constater que ses mécanismes actuels ne permettent pas de résoudre les tensions entre ses membres les plus influents.
Pour certains, la réforme de l’OIF est inévitable. "Il est temps que l’organisation évolue pour mieux répondre aux défis politiques contemporains", suggère un expert en relations internationales. "Il ne suffit plus de se réunir pour parler de la langue française, il faut agir pour garantir la paix et la sécurité dans les pays membres."
En attendant, l’incident entre Félix Tshisekedi et Paul Kagame laisse présager d’autres tensions dans les forums internationaux à venir. La Francophonie, malgré ses intentions louables, risque de devenir un théâtre de confrontations diplomatiques si elle ne parvient pas à se réinventer.
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