
Le Président du Gabon Oligui Nguema lance un PDG bis : le simulacre démocratique
Brice Oligui Nguema vient de franchir une nouvelle étape dans sa stratégie de consolidation du pouvoir : le lancement officiel de son propre parti politique. Alors même que la Constitution, remaniée en 2024, concentre déjà tous les leviers exécutif et législatif entre ses mains, cette initiative semble davantage répondre à un besoin de légitimation symbolique qu’à une nécessité politique réelle. Jean‑Rémy Yama, figure de l’opposition, n’hésite pas à dénoncer ce qu’il appelle déjà un « PDG bis ». Et avec une loi encadrant drastiquement les partis, on se rapproche dangereusement de la monarchie réinventée.
Un marquage symbolique dans un régime déjà verrouillé
L’annonce du lancement du parti par Oligui Nguema survient le 22 juin, avec une assemblée inaugurale prévue le 28, au Palais des Sports de Libreville. Une manœuvre presque grotesque : la Constitution, adoptée en 2024, offre déjà au président un pouvoir quasi-illimité – nomination des ministres, dissolution du Parlement, direction des forces armées, état d’urgence… tout y est.
Pourquoi donc ce parti ? Pour se donner une aura de « majorité populaire » ? Pour masquer l’état autoritaire du régime naissant ? Car en réalité, le Parlement n’a ni contrepouvoir, ni réelle autonomie : il obéit. L’opposition l’a bien relevé, dénonçant une « servilité à nulle autre pareille ».
« C’était pas nécessaire »: le PDG bis est déjà là
Jean‑Rémy Yama le dit sans ambages : créer un parti est vain, « la Constitution donne tous les pouvoirs au président, à tel point qu’il n’a même plus besoin de majorité à l’Assemblée ». Meilleur résumé ? Non. Avec cette initiative, le président se fabrique une légitimité factice, tout en recyclant les pratiques du Parti démocratique gabonais (PDG) : clientélisme, cooptation, verrouillage. « Ce sera la création d’un PDG bis. Je pense que les mêmes tares… se reproduiront », poursuit-t-il, se projetant dans un déjà-vu hanté par l’hégémonie du régime Bongo.
Le PDG, dissous après le coup d’État de 2023, renaît ici sous de nouveaux habits. Le nom est changé, mais le décor reste le même : un parti-machine pour maintenir le pouvoir, sans pluralisme, sans débat démocratique.
Partenariats forcés et retour au parti unique ?
Cerise sur le gâteau : cinq jours plus tôt, le 17 juin, l’Assemblée avait adopté une loi réduisant le paysage politique national à trois ou quatre partis maximum. Sous le prétexte d’un combat contre l’inflation des formations, on impose des seuils d’adhésion (9 000 ou 12 000 membres selon les sources). Derrière les mots, la finalité : verrouiller l’opposition, forcer les plus petits partis à fusionner ou à disparaître, et surtout façonner une majorité acquise, afin de transformer le Parlement en simple chambre d’enregistrement.
Sous couvert de réformes, on assiste déjà à une dérive autoritaire : une monarchie présidentielle renforcée, débarrassée de la concurrence politique.
Un risque de nouvelle dictature déguisée
Brice Oligui Nguema ne se satisfait plus de la légitimité militaire. Il veut celle d'une « majorité populaire ». Mais ce simulacre démocratique sent le retour du régime unique. La Constitution de 2024, taillée à sa mesure, lui donne déjà les pleins pouvoirs; pourquoi, alors, ce nouveau parti sinon pour renforcer son ancrage, écarter la dissidence, museler le pluralisme ?
Le scénario est limpide : un parti personnel pour porter en apparence la voix du peuple, récuser l’idée même d’opposition véritable, et préparer une emprise durable sur l’État. À Libreville, l’arbre du pluripartisme semble déjà mort sous les tronçonneuses législatives.
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